Au XVIème siècle, le Baron d’Espagne Montespan s’appelle Roger IV d'Espagne. Alors que dans le Louron et à Cazaux – Debat, les communautés villageoises s’organisent pour développer l’agriculture et pour exploiter au mieux la montagne, Roger IV renoue avec la glorieuse tradition guerrière de sa famille. Fait prisonnier avec le Roi de France à Pavie, il alterne toute sa vie entre l’aventure militaire en Italie et ses fonctions de seigneur à Montréjeau et dans les vallées. C’est lui qui passe des traités avec les communautés du Louron. Jusqu’à nos jours, ces traités organisent l’exploitation de la montagne et des forêts.
Roger IV est né en 1501. C’est l’arrière petit fils de Roger 1er. Son père décède alors qu’il n’est encore qu’un enfant. Sa sœur cadette, Anne Paule d’Espagne,
épouse en 1514 Pierre de Coarraze puis en seconde noces en 1521 un cousin de ce dernier, Antoine de Pardaillan de Gondrin, fils d’un commandant des rois Louis XII et François 1er. Arnaud de
Pardaillan. Ce dernier commanda en effet 4000 Gascons et 1000 chevaux que le roi Louis XII envoya en 1514 à Jean d'Albret, roi de Navarre, pour combattre les Espagnols. En 1517, Il porta
secours au roi de Danemark avec 2 000 hommes. Il est possible que le jeune Roger d’Espagne orphelin de père, participa à ces expéditions. Les jeunes nobles que l’on destinait à la carrière
militaire étaient en effet très tôt conviés à participer à la vie militaire auprés d’un puissant protecteur et il apparait que les Montespan et les Pardaillan entretenaient des relations proches
symbolisées par le mariage de Paule d’Espagne avec Pierre de Coarraze puis Antoine de Pardaillan.
L’armée du XVIème siècle
Car les temps sont violents, et la guerre aux portes des Pyrénées. L’époque est marquée par la rivalité de Charles Quint, Archiduc d’Autriche, Roi des Espagne (Aragon et Castille), empereur du Saint Empire Romain germanique, et du Roi de France, François 1er.
L’armée d’alors a considérablement évolué depuis le moyen-âge : il s’agit maintenant d’une armée professionnelle, où l’artillerie, avec ses boulets de fer, et l’infanterie armée de piques, d’arquebuses et de mousquets, jouent un rôle essentiel.
L'armée de la Renaissance est une armée rétribuée . De ce fait, et à cause de son budget, François 1er ne réunit jamais plus de 50.000 hommes pour ses opérations de guerre, ce qui était pourtant considérable pour l'époque. Vestige des temps anciens, on trouve encore le ban et l'arrière ban, composé de tous les nobles possédant des fiefs qui doivent un soutien militaire au Roi. Les roturiers n'en font pas partie et payent une taxe estimée entre 15 et 20% du revenu foncier. C'est le Bailli qui procède à une "monte en robes". Cette "monte" est un conseil de révision qui sélectionne les nobles qui iront grossir les rangs de l'armée dès que le Roi décrète une levée du ban. Chaque homme doit être équipé de deux chevaux et une cuirasse complète, lance épée pour l'Homme d'Arme, et cheval corselet, épieu et pistolet pour l'Archer. Chaque homme est rétribué pour sa participation selon son grade. Les compagnies sont de cent hommes d'armes et deux cents archers. A partir de 1536, ban et arrière ban comptent des fantassins dans leurs rangs, car les possesseurs de petit fiefs obtiennent de faire un service à pied, ce qui revient moins cher que monté à cheval.
La compagnie d’ordonnance, que l'on appelle aussi gendarmerie, constitue la force principale de l'armée. C'est sa cavalerie lourde. Les hommes qui la composent sont des soldats volontaires, tous de souche noble. C'est une armée permanente, dont les personnels touchent une solde annuelle. Les compagnies sont logées dans des villes de garnison. Elles sont organisées en "lances". Chaque lance est un groupe de soutien du cavalier "lourd". Il se compose de deux artilleurs, haquebutier, d' un coutilier, chargé d'exécuter les cavaliers ennemis tombés en les poignardant à travers leurs cuirasse, et d'un ou deux valets qui font les petites tâches de soutien. Le cavalier, on devrait dire le chevalier, est entièrement cuirassé, son cheval est protégé sur les flancs , la tête et le cou. Mais la vulnérabilité de ces cavaliers lourds est évidente: à terre, ils sont égorgés par les coutilliers, de même qu'ils s'empalent sur les longues piques des fantassins Suisses ou Allemands. Enfin, l'arme à feu sonne la fin théorique du cavalier armuré. Les valets des chevaliers de la Renaissance ont aussi pour fonction de négocier le rachat de leur maître (ou de la dépouille de celui-ci) lorsqu'il est fait prisonnier par l'ennemi. Le champ de bataille au Seizième siècle est donc le lieu d'une féroce compétition pour capturer les plus riches cavaliers de l'armée ennemie. De la "fortune" des armes dépent la constitution ou la perte de véritables fortunes financières qui changent ainsi de main lors des engagements.
L’armée de François 1er, c’est aussi l’infanterie. L’arquebuse, nom dérivé du mot allemand Hachenbusche, existe depuis un siècle (1425). Mais en 1525, elle est modernisée. L’arquebuse « à platine à mèche » permet d’utiliser les deux mains pour pouvoir viser. et la technique de fabrication du canons rayé qui apparaît dès 1520 amène une plus grande précision du tir. Dans la seconde moitié du siècle, les soldats qui l’utilisent seont parfois appelés « fusiliers » du mot italien « fugile » qui veut dire silex.
L'arquebuse de la bataille de Pavie (1525)
L’infanterie est composée de troupes mercenaire qui s'offrent à qui a les moyens de les payer. Et les Etats s'empressent de s'adjoindre leurs services quand la guerre se déclare. De ce fait, on peut les retrouver un jour dans un camp, le lendemain dans l'autre (sauf s'il y a contrat d'exclusivité). Ce sont principalement des fantassins, bien équipés, dotés souvent des derniers armements, dont notamment les arquebuses. La nationalité importe peu. Mais les" bandes" de mercenaires se regroupent souvent par pays. Ils viennent de partout. Si les plus côtés sont les allemands et surtout les suisses, il en existe des français avec en particulier les Gascons et les Basques. Faut-il dire qu’ils ont mauvaise réputation ? En Italien de l’époque, « Gascon » est un mot qui veut dire pillard. En 1527, les Lansquenets allemands, alors au service de Charles Quint mettent Rome à sac pendant prés d’un an. C’est l’émoi dans la chrétienté. Regroupés en "bandes" ou "enseignes", de 250 à 500 hommes, on trouve des hallebardiers, des arquebusiers et des piquiers.
Une armée, c’est aussi l’intendance. Le service des Vivres a une importance cruciale. Pour une armée en campagne, c'est à la population environnante de se charger de fournir de quoi survivre. Le plus souvent, c'est en argent que cet impôt est prélevé, car les paysans ont tendance à ne donner que des fournitures de basse qualité. Villes ou institutions sont donc mises à contribution pour entretenir les corps d'armée en garnison. On comprend dés lors qu'en cas d'invasion, les défenseurs pratiquent la politique dite de la "terre brûlée", qui s'avéra si efficace - mais si terrible pour le pays et ses habitants - lors de l'invasion de la Provence par les Impériaux (l’armée de Charles Quint) en 1524.
l'argent est devenu le nerf de la Guerre. C'est d'ailleurs souvent lui qui décide du sort des armées majoritairement constituées de mercenaires, et donc du sort des batailles. Le budget de l'armée dépend de "l'ordinaire des guerres" et celui de la guerre de "l'extraordinaire des guerres". Il doit permettre de subvenir aux besoins d'une armée en campagne, et particulièrement aux gages des troupes mercenaires. Avec la succession effrenée des guerres, ces troupes deviennent de plus en plus permanentes. Les budgets qu'on leur alloue ne quittent pas la caisse de l'Extraordinaire de guerre qui se vide ainsi même en temps de paix. De nombreux détournements financiers sont causés par toutes ces imprécisions. Et des détournements sont organisés du haut en bas de l'échelle, y compris dans l'entourage Royal. La solde est versée chaque trimestre lors de revues. Des "passe-volants" sont parfois embauchés à l'occasion pour faire illusion de nombre. La différence peut ainsi être empochée par les gradés. Pour réprimer ces abus, le Roi nomme des contrôleurs. Mais ceux-ci s'entendent parfois pour profiter de la situation.
Un hallebardier touche 6 livres par mois, un arquebusier 7 et un suisse 9. Ces payes ne sont pas toujours assurées en temps et en heure, ce qui amène de nombreuses défections qui s'avérent militairement catastrophiques.
L'armée de la renaissance a trois défauts majeurs : elle est dépourvue de sens stratégique et se déplace trés lentement, elle a souvent un problème de commandement unique, le commadant en chef se trouvant pendant la bataille au sein de la cavalerie Lourde et enfin, c'est aussi surtout le cas de l'armée française, les soldats sont braves mais manquent de discipline, cette capacité à agir collectivement dans le cadre de réflexes conditionnés.
Les guerres d’Italie
En 1521, la guerre reprend. Elle est connu sous le nom de 6ème guerre d’Italie, mais elle reprend sur les contreforts pyrénéens de la Navarre alors occupée par les armées du Roi d’Espagne. Le roi de France soutient le roi de Navarre, Henri II d’Albret, un jeune souverain (il est né en 1503) fougueux qui veut récupérer la partie sud de son Royaume occupé par les Espagnols depuis 1512.
En 1521, Pampelune, capitale du Royaume de Navarre, se soulève. Henri II monte une armée avec l’aide de François 1er. Elle est commandée par l’un de ses cousins, André de Foix. Après quelques succés rapides, cette armée en nette infériorité numérique, est vaincue par les Espagnols à la bataille de Noain. La Haute Navarre est définitivement perdue pour la Maison d’Albret qui a némoins réussi à reprendre aux Espagnols Saint Jean Pied de Port et la Basse Navarre. Il est possible que Roger d’Espagne ait participé à cette expédition. Il a alors 20 ans, et sa famille est également liée à celle de Foix. Il est d’ailleurs Gentilhomme ordinaire de la chambre du roi de Navarre.
Roger IV d’Espagne Montespan fait partie des troupes conduites en Italie par Odet de Foix, appelé Lautrec, l’un des principaux maréchaux du Roi François 1er.
Odet de Foix, comte de Lautrec
Et toutes les vissitudes de l’armée de l’époque vont s’abattre sur l’armée de Lautrec. En 1522 en Italie, l’Armée de Lautrec est défaite lors de la bataille de la Bicoque, dans le milanais. Les causes : les impériaux sont équipés des derniers modèles d’arquebuses, décrits plus haut, et surtout, les Suisses qui composaient l’infanterie de l’armée Française s’en retournent chez eux car ils ne sont pas payés. La cause : la mère du Roi, Louise de Savoie, avait détrourné le montant de la solde pour couvrir ses propores besoins. Le roi couvrit le scandale en sanctionnant le ministre des finances.
En 1523, l’armée de Lautrec réussit à dégager la ville de Bayonne assiégée par les Impériaux et à refouler ces derniers au delà de la Bidassoa. On peut légitimement supposer que Roger IV a fait partie de l’expédition.
En 1524, répondant à l'appel du ban et de l'arrière ban, Roger IV lève dans les terres de sa baronnie une compagnie de gens d'armes (soit 100 hommes d'armes et 200 archers ou arquebusiers) qu'il conduit en Italie. Sa Baronie comprenait les villes de Montréjeau (capitale), Valentine, Cazères, les châteaux et maisons seigneuriales d'Ausson, Bordes, Villeneuve Lécussan, Cazarilh, Villeneuve de Rivière, Saint-Laurent, Mazères ainsi que plusieurs capitaineries parmi lesquelles Bordères Louron, dont dépendaient 24 autres villages parmi lesquels Ris, les Bareilles, Jezeau, Ilhan, Gouaux et les villages du fond de la vallée du Louron. Chaque village a du fournir en moyenne 5 combattants.
Bayard n’est plus là, le chevalier sans peur et sans reproche qui avait à lui seul stoppé la charge de 200 impériaux sur le pont du Garigliano en 1512. Et surtout, le chef de guerre habile tacticien qui avait stoppé à Mézière avec une petite garnison toute l’armée impériale s’apprêtant à envahir la France par le Nord. Bayard est tué le 29 avril 1524 d’un coup d’arquebuse dans le dos. Et le roi, personnage fantasque et quelque peu capricieux, a confié le commandement de l’armée à l’amiral Bonivet, l’un de ses proche, plutôt qu’aux expérimentés maréchaux La Trémoille ou La Palice.
Charles Quint avait décidé d’envahir la Provence en 1524 et de mettre le siège devant la ville de Marseille. François Ier rassemble une armée à Lyon afin de porter secours aux assiégés. Les troupes impériales rentrent en Italie. François Ier continue sur sa lancée et franchit les Alpes en trois colonnes qui totalisent une force d’environ 24 000 hommes.
L’armée française harcèle son adversaire et remporte de nombreux combats d’arrière-garde comme à Scarrasia. François Ier n’achève cependant pas ses adversaires à bout de souffle. Il veut peut-être remporter la victoire par un « beau » combat pour que sa renommée soit plus grande plutôt qu'en détruisant une armée en pleine retraite. Les Français partent alors à la conquête de Milan. La ville lombarde se remet juste d’une épidémie de peste. La ville se rend d’autant plus rapidement que ses remparts sont endommagés. A Binasco (près de Pavie) s’organise un conseil de guerre afin d’élaborer un plan d’action. Tous les grands capitaines de l’armée royale sont là : La Tremoille, La Palice, Bonnivet, les chefs des lansquenets, etc. La plupart d'entre-eux désirent la continuation de la poursuite des forces principales ennemies jusqu’à Lodi mais l’amiral Bonnivet préfère assiéger Pavie qu'il considère comme une place stratégique. François Ier décide de suivre cette dernière idée et met donc en branle son armée en direction du sud vers Pavie.
L’armée du roi s’installe autour de Pavie le 28 octobre 1524. Un siège en règle est nécessaire si les Français veulent prendre la ville. Ils commencent à installer des batteries de canons et bloquent complètement la cité.
Pendant que François Ier assiège Pavie, les Impériaux regroupent leurs forces près de Lodi pour secourir la ville. Ils reçoivent des renforts, dont des Lansquenets (15 000 hommes). Alors que les Impériaux se renforcent, François Ier envoie, afin de prendre Naples et pour faire diversion, une unité d’environ 7 000 hommes avec 12 canons commandée par le prince royal d’Ecosse Jean Stuart d’Albany. Il se prive ainsi d'une partie non négligeable de ses forces. Le commandant en chef des Impériaux, Pescara, décidé de saisir cette occasion. Le 24 janvier 1525, les Impériaux quittent Lodi en direction de Pavie. L’arrivée prochaine des Impériaux oblige François Ier à faire pénéter une partie de son armée dans le parc Vechio qui borde Pavie au nord. Pescara arrive devant Pavie le 3 février. Le 13 février, des mercenaires suisses quittent l’armée française en apprenant que leur pays est attaqué. Le 20 février, un des meilleurs combattant de François Ier, Jean de Médicis, est blessé. Il ne participera pas à la grande bataille. Le temps joue cependant contre les Impériaux, Pavie ne tiendra plus très longtemps. D’ailleurs, un messager envoyé par Leyva informe du piètre état moral de la garnison. Charles de Lannoy, l’un des chefs militaires impériaux, organise un conseil de guerre le 23 février pour connaître les différents avis des chefs de son armée. Plusieurs propositions sont avancées : traiter avec les Français ou livrer bataille. Finalement le conseil de guerre opte pour la seconde.
La nuit du 23 au 24 février, les forces impériales se mettent en mouvement. Elles réalisent trois brêches dans les murs protégeant les positions françaises.
Au même moment, un combat se déroule plus au nord qui oppose les cavaleries légères des deux camps.
La garnison lance une sortie vers le nord qui permet de couper les liens entre les troupes françaises Les lansquenets au service de Charles Quint rentrent dans le
parc, ils sont au nombre de 8 000 avec von Frundsberg et Sittlich à leur tête. Ils rencontrent les Suisses de Floranges et un combat à la pique commence au alentour de 7 h. Une autre colonne
d’infanterie arrive dans le parc. Composée d’Espagnols et de lansquenets sous les ordres de Pescara, elle est protégée sur son flanc gauche par de Lannoy avec des cavaliers. Elle prend la
direction de Mirabello.
Alerté, le roi de France sort de son campement avec ses gendarmes. Ils se positionnent sur le flanc droit des Impériaux face au bois qui dissimule ces derniers. Ils
sont soutenus par une trentaine de pièces d’artillerie légère. Plus au sud, un corps de Gascons dirigé par le duc de Suffolk et les lansquenets du duc de Lorraine - appelés les bandes noires à
cause de leur tenue sombre – se met également en position. Au nord de ces troupes, l’artillerie française entre en action. Mais François 1er lance sa cavalerie lourde sur les flancs de l’attaque
impériale vers 7 h 40. Cette action empêche l’artillerie de poursuivre ses tirs.
La cavalerie française,environ 3 600 hommes, tombe sur la cavalerie impériale qui protège le flanc droit de l’attaque contre les troupes du roi de France. La cavalerie de Lannoy ne fait pas le poids, elle doit se dégager pour retraiter en direction du bois et de l’infanterie. François Ier continue à la poursuivre jusqu’à l'orée du bois. Pour le roi de France, cela ne fait aucun doute : la victoire est acquise Mais les arquebusiers impériaux protégés derrière des arbres commencent à détruire la cavelrie lourde française dangereusement isolée au milieu des troupes adverses. Très vite les morts s’accumulent. Des noms prestigieux s'ajoutent à la liste des tués: le maréchal La Palice, Bonnivet qui combat sans heaume, La Trémoille. Devant la tournure des événements, François Ier décide de quitter le champ de bataille avec sa garde. L’artillerie française ne peut intervenir car elle risque de toucher ses propres troupes
Lorsque le roi commence à quitter la bataille vers le nord en direction de Milan. Il se trouve rapidement encerclé par les Impériaux. La garde personnelle du roi succombe. Le souverain combat vaillamment mais un arquebusier tue son cheval. Le corps de l’animal en tombant coince sa jambe. C'est la fin. Le souverain frôle la mort mais il est sauvé par l’intervention du vice-roi de Naples, de Lannoy. Ce dernier reçoit l’épée de François Ier en s’agenouillant. Le roi de France est amené hors du champ de bataille sous bonne escorte.
Les piquiers au combat à Pavie
Les bandes noires, lansquenets à la solde du roi de France, se déplacent pour porter assistance au roi. Sur leur chemin, ils rencontrent les lansquenets de Frundsberg. Le duc de Suffolk et François de Lorraine tombent au combat et les bandes noires refluent. Il a fallut moins de 3 heures pour que la défaite de François Ier du roi soit consommée. Les arquebusiers impériaux s’emparent de sa personne vers 8 h 20.
Les Suisses encore au service de François 1er ne peuvent défendre l’artillerie qui tombe aux mains de l’adversaire. Les troupes française commandées par Montmorency finissent par se retirer vers le Tessin. Mais le seul pont permettant la retraite est détruit avant que le gros des fuyards ne soit en sécurité sur la rive opposée. Le duc d’Alençon a cherché à préserver ses troupes, plus de 5 000 hommes, d’un désastre. Afin d’échapper au massacre, les Suisses se jettent en grand nombre dans le Tessin. L’eau engloutit des hommes par centaines, d’autant plus que le courant est violent. Sur le côté ouest de la ville, l’arrière- garde commandée par d’Alençon prend la direction de Milan. La bataille de Pavie se termine donc par un succès indiscutable des Impériaux.
L’armée française a perdu vraisemblablement plus de 10 000 hommes tués ou capturés. Les Impériaux déplorent la perte de 500 des leurs. L‘artillerie royale (53 canons) reste aux mains des vainqueurs. Beaucoup de grands capitaines français ont perdu la vie au cours de la bataille ou ont été capturés. Les Impériaux se sont emparés de François Ier. Le dernier roi français prisonnier après une défaite fut Jean le Bon à Poitiers en 1356. Déjà, à cette époque, un Montespan partagea sa captivité.
Les conséquences de la bataille sont évidemment désastreuses pour le royaume de France. Outre la perte d’une armée et la capture du roi, les Français abandonnent la
Lombardie. L’Italie doit accepter la domination impériale. La guerre continue cependant même après la libération de François Ier en janvier 1526. Le roi libéré en promettant de renoncer à ses
rêves de conquête en Italie ne respecte pas ses engagements et continue la lutte. La guerre va durer jusqu’en 1559, date du traité de Cateau-Cambrésis.
Roger IV s’est distingué parmi les plus vaillants aux côté du roi de France. Il est fait prisonnier en même temps que la fleur de la noblesse française. Avec lui se trouve le roi, rapidement amené à part, son beau frère Antoine de Pardaillan, Thomas de Foix dit Lescun, qui est mourrant, et tant d’autres. Les impériaux font le tri : ceux qui ont les moyens de payer une substencielle rançon et les autres. Roger de Montespan à les moyens. Il reste en captivité. Les autres, les obscurs, les pauvres hères, les nobles infortunés, prennent le chemin de la France encadrés par la cavalerie et les gens de pied des impériaux. Après d’épuisantes étapes et nourris de quelques trognons de choux, les survivants atteignent la frontière humiliés et faméliques.
Pendant ce temps, Roger IV est amené à Madrid, avec le roi. Des proches s’activent pour rassembler la rançon demandée. La famille de Montespan contracte des emprunts, engage des terres. Les bijoux et objets de valeurs de Madelaine d’Aure, la mère du baron, sont vendus. Les consuls, bourgeois et habitants de Montrejeau se cotisent volontairement pour réunir les derniers cents écus d’or qui manquent pour réunir la somme exigée. Les espagnols libèrent le baron de Montespan qui revient sur ses terres avec un sentiment de reconnaissance pour tous ceux qui s’étaient mobilisés pour lui.
La vie personnelle
En 1526, il se marie avec Catherine de Vèze, fille du seigneur de Forcalquier, en Provence. Ce fut un mariage de raison, en lien avec la nécessité de reconstituer la fortune familiale et de rembourser les emprunts. Le couple n’eu pas d’enfant, bien que Roger de Montespan en est eu de son côté : une fille, Germaine, à qui il légua à sa mort 4000 livres d’une part, et 1000 livres pour ses bagues. Les 4000 livres étaient représentées par le château d’Ausson à Montréjeau, où il est décédé en 1555. Il avait également un fils batard, Pierre, seigneur de la Bastide. Il avait eu une autre fille, décédé jeune, Gaillarde. Sa veuve était remariée en 1564.
Un administrateur
Roger de Montespan a dû alterner ses activités guerrières en Italie ou les guerres continuèrent jusqu’à la paix de Cateau-Cambresis en 1559. C’était la vie des seigneurs de cette époque.
Quand il ne se battait pas, il résidait dans son manoir d’Ausson prés de Montréjeau. C’était encore une demeure féodale, crènelée, gardée par des arquebusiers, mais c'était déjà une demeure de la Renaissance. Elle était vaste, avec d’immenses communs, des jardins ouverts sur des prairies et la rivière. Là, il recevait ses parents, amis, les consuls des villes et des villages dont il était le seigneur, ceux qui venaient lui rendre hommage, ou plaider une affaire. Il recevait aussi l’évêque, Jean de Mauléon avec qui il était apparenté, les prêtres des paroisses et les religieux augustins de Montrejeau.
Il s’intéressait à la vie des habitants des villes et des villages dont ils était le seigneur. C’est ainsi qu’il a réglé un vieux contentieux de plusieurs siècles qui opposait la famille de Montespan et les habitants de Montrejeau. Il s’agissait d’un problème de bornage entre les propriétés appartenant en propre aux Montespan et les immeubles appartenant à la ville de Montrejeau. Depuis la création de la Bastide au XIVeme siècle, ce problème n’avait été traité que par la violence des seigneurs. Là, ce fut par une transaction validée par les juges de Toulouse que le problème fut traité définitivement, en 1534.
Roger d’Espagne s’intéressait aussi à l’économie de ses villes et de ses vallées. Au XVIeme siècle, Montrejeau est un centre commercial du trafic de la laine et des peaux. Les tanneries sont un des principaux éléments de l’activité économique de la ville. De même pour le travail de la laine sous ses formes diverses. Et le Baron de Montespan doit entrevoir l’importance que pourrait prendre rapidement l’exploitation du bois des hautes vallées pyrénéennes. C’est pourquoi, partout, il alla régler de façon pérenne la gestion des forêts et des estives. C’est ce qu’il fit dans le Louron.
A cette époque, la vallée des Bareilles comptait déjà trois villages : Is, Pouy et Gèdre (aujourd’hui : Bareilles). Les habitants étaient surnommés eths empourès, les marchands de résine. Le même surnom a été donné aux habitants de Gouaux, en Aure, autre village dont les Montespan étaient les seigneurs. Les forêts de pins des Bareilles étaient exploitées. Le chemin enpierré, que le promeneur peut toujours emprunter et qui part de Bareilles (le village) vers le lac de Bordères, permettait d’acheminer le bois de la montagne vers le village. Dans les forêts, des charbonniers (carbouès) fabriquaient du charbon de bois. Ils étaient bucherons, débardeurs. Ils versaient de l’eau sur les pavés du chemin pour entrainer les troncs. C’était un travail pénible qu’ils réalisaient en restant entre eux, à l’écart du reste de la population. Par un traité en date du 25 janvier 1532, Roger d’Espagne baron de Montespan accorda aux habitants le droit de prendre du bois dans la forêt appellée lou fagau (bois de hêtres) et lou labéda (quartier de pacage) pour leurs besoins nécessaires et le droit d’arrenter et de vendre les arbres de sapins et de hêtres, "mais pas de chênes". Cependant, il déclare se réserver et retenir, pour lui et ses successeurs, la faculté de couper dans ladite forêt des arbres pour alimenter une scierie. Il conclu le même type de traiter avec d’autres communautés villageoises du Louron, au cours des années 1530 -1540.
Le traité du 2 novembre 1532
Pour Cazaux – Debat, il conclu un traité qui concernait aussi l’exploitation de la montagne par les troupeaux.
Le lac de Bordères avec au fond et sur la droite de l'image, la montagne de Lerm longtemps appelée la forêt de Lerm
Comment imaginer Cazaux – Debat en cette première moitié du XVIeme siècle ? C’était un village d’agriculteurs qui déjà, devaient exploiter les champs en terrasse au dessus du villages. Ils devaient y produire le blé, le sarasin et les céréales et les légumes qui existaient à cette époque. C’était aussi un village d’éleveurs, d’ovins, de carpins, de bovins. Et par cette activité, ils étaient en conflits avec les villages à l’entour. Le village de Cazaux – Debat s’est émancipé de Ris assez tard et ne bénéficiait pas en propre de « montagne », c’est-à-dire de prairies d’altitude pour le bétail en été. C’étaient des montagnes reconnues aux villages à l’entours, et que les éleveurs de Cazaux utilisaient à leurs risques et péril ainsi qu’à celui de leur troupeaux.
En 1532, le village devait être structuré autour de la carrère actuelle. A l’époque, l’église devait être à son emplacement actuel. Elle était neuve, et avait été construite en reprenant les éléments d’une construction plus ancienne
.
La carrère est la plus ancienne fontaine du village
La maison connue sous le nom de Bégué devait être une grande ferme fermée, permettant de servir de refuge. Et de l’autre côté de la carrère, actuelle ferme de Casteran, devait se trouver la ferme appartenant à Bertrand de Sens, consul. La ferme est resté dans la famille Sens jusqu’au début du XIXeme siècle au plus tard. Un troisième personnage de Cazaux - Debat nous est connu : Jean Carrère l’ainé, conseiller.
Bertrand de Sens et Jean Carrère sont deux des trois représentants de la communauté villageoise qui ont conclu avec les représentants des autres communautés un traité, en novembre 1532, avec le Noble et puissant seigneur Roger d’Espagne.
Les consuls sont en général au nombre de deux, mais il y a des exceptions : Ens ou Tramezaygues n’en possédaient qu’un. L’absence de l’un des deux explique peut-être la présence d’un conseiller, Jean Carrère l’ainé, un ancien de la communauté, pour représenter la communauté devant le seigneur.
Les consuls étaient désignés par ceux qui, dans la communauté, étaient appelés. Ceux qui choisissaient les consuls étaient qualifiés de jurats, prudhommes, habitants reçus ou encore « habitants formant la plus grande et saine partie de la communauté ». Il fallait donc si possible être du village (y être né), être le chef d’une maison respectée du village, ou gendre local (celui qui a épousé la fille ainée d’une maison). Il fallait payer un règlement d’admission, par exemple, 5 livres et deux pintes de vin (sympathique coutume par laquelle était fêtée dignement l’élection annuelle des consuls). Les étrangers à la communauté (ceux qui étaient nés ailleurs) pouvaient devenir électeur à condition de remplir toutes les autres conditions et de payer un « droit d’entrée » spécifique. Le choix des candidats aux fonctions de consuls était fait par les consuls en place. Ensuite, les jurats votaient. Ils élisaient directement les consuls ou bien, pour les villages relevant de la jugerie de Rivière - Verdun, il dressaient une liste de nom parmi lesquels le représentant du seigneur choisissait. Pour Cazaux – Debat, on peut estimer que c’était ce dernier cas, car le village semble à cette époque dépendre de Rivière – Verdun.
Les consuls avaient le droit d’établir des impôts temporaires ou perpétuels, d’instituer des receveurs pour la rentrée de ces impôts. Ils répartissaient les impôts et pouvaient sanctionner les récalcitrants par des saisies de gages qu’ils pouvaient faire vendre. C’est eux qui déterminaient les quartiers de montagne ou de forêts, les forêts et pacage à interdire, la protection des bois, l’usage des fontaines et des canaux d’arrosage, l’entretien de toutes les routes et des cols, la vérification des bornes, l’estimation des dégats commis aux chemins, fossés et ponts de la communauté. Enfin, le consul faisait régner l’ordre dans la communauté, selon les décisions prises par l’assemblée des jurats. Il pouvait s’agir du prix de la vente de victuailles ou de leur qualité, autoriser ou non des danses publiques, interdire les jeux de cartes et de hasard, etc. La fonction n’était pas rétribué et le consul était redevable de son action. Ainsi, les habitants d'un villages qui avaient subit un redressement concernant l'impôt royal du fait d'une erreur des consuls c'étaient retournés contre ces derniers, qui avaient dû indemniser les contribuables malheureux.
Mais alors, qui était ce syndic, Jean de Portales, autrement dit Solé ?
Le consul n’était pas nécessairement des plus compétents, ni des plus représentatifs pour traiter une affaire aussi importante que les droits d’usage de la montagne avec le seigneur. Un certain nombre de faits indiquent par exemple, que les consuls ne savaient pas lire. Proposés par leur prédécesseur qui comptaient bien, dans certains cas, le redevenir l’année suivante, ce n’étaient pas nécessairement les plus malins ni les plus capables de la communauté. C’est pourquoi, toutes les affaires étaient discutées et voté par l’assemblée des jurats, réunis sous le porche de l’église à l’appel de la cloche : désignation des députés aux assemblées de vallée, choix du carillonneur, du vacher, d’un régent, répartission des impôts, rédaction des doléances à l’administration, luttes d’intérêt avec le seigneur, le curé, les communautés voisines ou les compatriotes récalcitrants.
Quand la question est grave et peut porter à litige, le procés verbal est rédigé par un notaire sous forme d’acte public et tous ceux qui savent signer le font. Quand le litige apparait ardu, ou que le débat n’aboutit pas à des résolutions immédiates, la communauté désigne un syndic qu’il soit du village ou étranger, manant ou noble, clerc ou laïc, peut importe. C’est l’homme idoine au sujet, aux pouvoirs limités et extraconsulaires. Il prend la cause en main pour représenter la communauté.
Ainsi, Jean de Portales a été désigné pour aller porter les doléances de la communauté villageoise de Cazaux – Debat jusqu’à Ausson, demeure de Roger d’Espagne seigneur de Montespan. Il a été choisi parce qu’il était capable de plaider la cause du village devant un seigneur puissant et donc, impressionnant pour des villageois. C’était aussi une cause complexe, puisque plusieurs communaté villageoises voisines et le seigneurs lui-même était concernés. Il a donc dû aller plaider la cause par une requête préalable avant de se déplacer, puis négocier avec le représentant du seigneur, ce Bernard de Larrous cité comme témoin, avec les représentants des autres villages concernés. Cela a dû prendre du temps, sans doute plusieurs années. Et a abouti à ce traité, qui précise les droits et libertés des habitants de Cazaux – Debat concernant la forêt de Lerm.
Au fond, Bordères Louron - Toute la vallée était le fief des barons de Montespan
Les trois représentants du village ont dû quitter le village endimanchés : bonnet neuf, petite cape, souliers. Ils ont du passer par le chemin du Maouloc et devant
le moulin pour rejoindre Bordères par la rive droite de la Neste. Là les attendaient le seigneur Roger d’Espagne installé dans son château de Bordères tenu par l’un de ses capitaines,
entouré d’un bayle et de plusieurs seigneurs.
"L’an mille cinq cent trente deux de la deuxième du mois de novembre, au lieu de Bordères, Diocèse de Comminges et sénéchaussée de Toulouse et dans la maison de
Bertrand, sire Bayle comme sont ainsi et dit a été qu’il y eu procés men et a mou v vin à l’avenir entre les syndic, consuls et habitants du lieu de Cazaux-Debat, pays d’Aure, d’une part, et
noble et puissant seigneur Roger d’Espagne, Seigneur de Montespan, de Bordères et dudit lieu de Cazaux-Debat, d’autre part.
Et ce pour raison et cause du droit prétendu par lesdits habitants de faire dépaitre leur bestiaux dans la montagne de Lerm sise au dessous de la juridiction et
lieu dit et droit dudit Bordères et faire dans ycelle des cabanes pour mettre à couvert Iéeny, et couper du bois pour l’usage desdits habitants, ont demeurés d’arrord entre eux en la manière qui
suit ci-après rédigé par écrit.
Or est il que ce jourd’hui et an ci-dessus exprimés, en présence de moy, notaire etc. constitués leurs personnes savoir le susdit Noble Roger d’Espagne, d’une
part, et Jean de Portales, autrement dit Solé, Syndic, Bertrand de Sens, consul, et Jean Carrère l’ainé, conseiller dudit lieu de Cazaux-Debat, d’autre part, lesquels de leur plein grés, tous
ensemble et chacun d’eux pour le tout, savoir : ledit Noble Roger d’Espagne, tant pour soi que ses héritiers, et lesdits syndic, consul et conseiller tant pour eux en leur nom et chacun d’eux et
leurs héritiers qu’au nom de toute la communauté dudit lieu, ont transigé et policé sur ledit différent et d’autres qui pourraient survenir à raison de ce et premièrement sont restés d’accord que
lesdits habitants qui sont à présent et qui seront à l’avenir , pourront, à perpétuité, mettre à faire paître leur troupeaux et leur bestiaux tant ceux qui leur appartiennent en propre que ceux
qu’ils auront en gazaille de quelle condition qu’il soient et les enfermer dans des cabanes tant le jour que la nuit dans la montagne appelée de Lerm, sise en dessous de la juridiction dudit lieu
de Bordères, et qu’ils les y pourront mettre tous le jour de la fête de Saint Barnabé, Apôtre, [ le 11 juin] et non auparavant, pour paître les herbes feuilles et autres fruits de ladite montagne
; de plus sont demeurés d’aurore, que s’ils les mènent dans ladite montagne auparavant dudit terme, ils seront tenus, pour chaque fois qu’ils seront trouvés en faute, de donner à payer audit
Seigneur d’Espagne et à ses successeurs la somme de dix sols tournois partageable pour moitié entre ledit seigneur d’Espagne et les consuls dudit lieu de Bordères.
Encore a été convenu que lesdits habitants pourront et leur sera permis de prendre et couper des fustes pour la construction de leurs maisons et bordes, et du
bois pour leur chauffages, savoir :
des hêtres, l’édouts et mortbois, et non autre mens, ni d’autres arbres, et s’ils font le contraire, seront tenus lesdits habitants de donner à payer audit
Seigneur d’Espagne ou ses successeurs la somme de quinze sols tournois pour chaque fois qu’ils seront trouvé en faute.
Comme aussi a été convenu que lesdits habitants ne pourront vendre ledit bois et fustes à aucun sans le congé, licence et permission dudit Seigneur d’Espagne et
ses successeurs, et s’ils font le contraire, directement ou indirectement seront tenus de payer audit seigneurs ou à ses successeurs la somme de douze sols tournois pour chaque fois qu’ils seront
trouvés en faute.
Pareillement aussi, ledit Seigneur de Montespan a donné et concédé audits habitants dudit lieu de Cazaux-Debat au sujet des stipulations ci-dessus en
confirmant toutefois le privilège du droit qu’ils ont de faire dépaitre leur bestiaux dans les montagnes d’Artiguelongue, Montorrouy et Serre-Badet audits habitants accordé par feu
Noble et puissant Seigneur Arnaud d’Espagne, vicomte de Couserans et Seigneur de Montespan à donné et transféré le droit de dépaitre et d’envoyer leurs bestiaux, de quelles conditions
qu’ils soient dans lesdites montagnes, tout de la même manière que les habitants des lieux de Bordères et de Ris ont l’habitude de les y mettre.
Finalement a été convenu qu’en considération des susdites franchises et libertés lesdits habitants dudit lieu de Cazaux seront tenus tous les ans et à
perpétuité à chaque fête de Toussaint donner et payer audit Seigneur d’Espagne ou à ses successeurs à l’avenir dans ledit lieu de Bordères savoir la somme de deux cens petits et demi tournois.
Comptant pour chaque écu vingt sept sols et demi et de se tenir aussi à la réparation du château dudit lieu de Bordères précisément sans aucune contradiction, à l’obligation de leur bien de
chacun d’eux et de toute la communauté dudit lieu de Cazaux et ainsi l’ont juré et témoins Noble Bernard de Larrous dudit lieu de Bordères ; Guilhaumme de Caplong, seigneur de
Bonrepaux"
Pour le village de Cazaux – Debat, la défense de ce traité et l’exploitation de la forêt de Lerm fut la grande affaire communale jusqu’à la fin du XIXème siècle et la disparition de la forêt, surexploitée. Elle donna lieu a nombres de procès dirigés soit contre les descendants de la famile d’Espagne- Montespan, soit contre les autres villages, soit contre l’administration des eaux et forêts.
Un seigneur de la Renaissance
Roger d’Espagne est un seigneur de la Renaissance. En Italie, il a été le contemporain de Michel -Ange, Titien, Leonard de Vinci, Machiavel, les Medicis. A la cours de Navarre, il a fréquenté Marguerite d'Angoulème, reine de Navarre par son mariage et soeur de François 1er et avec elle, il a connu les grands poètes et écrivains de cette époque comme Clement Marot, Il est aussi le contemporain de Martin Luther, le fondateur de la religion réformée et donc de la contreréforme catholique, le concile de Trente en 1542.
Les terres du seigneur Roger d’Espagne faisaient partie du diocèse de Comminges, qui avait une particularité, particulièrement sensible à cette époque : il était à cheval entre la France et le Royaume d’Esapgne de Charles Quint. Autre particularité régionale : la présence de la famille d’Albret, sensible aux thèses de Luther et de Calvin, et qui devait même basculer du côté de la cause protestante dans la deuxième partie du XVIéme siècle.
Marguerite de Navarre en 1530
Les Montespan étaient des proches des rois de Navarre également comte de Bigorre et de Foix, seigneurs d’Aspet. Mais ils sont restés fidèle à la foix catholique, le protestantisme ne pénétrant pas les vallées pyrénéennes. Il y a des raisons à cela.
Le culte des morts était une expression fondamentale de la foi des habitants du diocèse du Comminges. Les prêtres étaient organisés en confrérie et l’argent que le culte des morts générait permettait d’irriguer l’économie locale. Les confréries pouvaient en effet prêter de l’argent aux particuliers comme aux communautés.
Une autre expression fondamentale de la piété des montagnards était le culte à la Vierge Marie.
Enfin, un autre élément plus profanne incitait les montagnards à rester fidèle au culte catholique : la proximité avec l’Espagne, le royaume champion de la cause catholique. A cette époque, l’argent coule en Espagne. Cortes a envahi le Mexique en 1520. Elcano a réalisé le premier tour du monde en bateau, permettant à l’Espagne de faire commerce avec les Philipines où se trouvent des denrées particulièrement recherchées et chères, comme les clous de girofle et le poivre. Les conquisadores espagnols ont mis la main sur les richesses de la cordilière des Andes, l’or et l’argent. Il devient donc courant pour les habitants des Pyrénées de ce rendre en Espagne travailler à la belle saison, voire dèjà pour émmigrer. Il n’est donc pas question de changer de religion.
Toutefois l’évêque du Comminges, Jean de Mauléon, prend des mesures pour renforcer la foi de ses fidèles. C’est lui qui embelli considérablement la cathédrale de Saint Bertrand de Comminges.
Et c’est aussi à cette époque que les églises du Larboust et du Louron se couvrent de peintures qui en font aujourd’hui loriginalité. L’église de Cazaux – Debat ne fait pas exception à la règle. Ces peintures ont été recouvertes à la fin du XIXème siécle, et n’attendent plus qu’une restauration bienvenue pour les redecouvrir. Selon Dominique Rey dans la monographie qu’il a réalisé à la fin du XIXème siècle, « Certaines restaurations ont fait disparaitre des peintures et d’autres monogrammes en relief à la clef de voute et aux piédestaux des cintres. » Il ne reste plus qu’à les redécouvrir.
Une église du Louron avec ses peintures du XVIème siècle
Avec Roger IV d'Espagne mort sans enfant légitime, s'éteint en 1555, cette première lignée de la maison des barons d'Espagne de Montespan. A cette époque, la baronnie de Montespan entre dans la maison des Pardaillan de Gondrin, en vertu du mariage de Paule d'Espagne, sœur de Roger IV, avec Antoine de Pardaillan de Gondrin qui avait été lui aussi un combattant de Pavie.