Le mardi 14 août 2012, la visite commentée des moulins et fours de la vallée du Louron s'est arrêté à Cazaux-debat.
Programme de la visite commentée par Jean-Luc Herpin, auteur de «Pains, fours et moulins d'ici et d'ailleurs» :
Les fours à pains de Loudenvielle,
le moulin à foulon d'Avajan, chez Michel et Annie Soulé ;
Les meules de La Prade, le four de Cazaux-Debat : dégustation et vente de pains et produits de la ferme de Jean-Bernard Casteran, berger,
Le four de la cheminée des Casteran a été rallumé pour l'occasion
Le boulanger enfourne sa fournée avec l'aide de Jean-Bernard Casteran
La fournée est prête
les fours de Vielle-Louron,
le moulin abandonné d'Adervielle,
le moulin de Saoussas de la famille Martin avec démonstration de mouture et de fonctionnement du banc de sciage, visite du musée des Vieux Outils, dégustation et vente de fromages.
À 21 heures, dans la salle du cinéma Arixo, deux films ont été projetés : «Pains, fours et moulins d'ici et d'ailleurs» et «L'azalaï du pain, du livre et des outils» (projet humanitaire)
La participation à la balade était au profit de projets humanitaires au Sahel.
Vous trouverez des renseignements supplémentaires sur le site ://www.lamiedupaindesfoursetdesmoulins.fr
Cazaux-Debat signifie "les jardins d'en bas".
C'est pour des raisons agricoles que le village a été édifié. Au fils du temps, les villageois ont dressé des murs et aménagé des terasses pour cultiver d'abord des céréales : du blé, du blé noir appelé aussi le sarazin, de l'orge du seigle. Ensuite ont été cultivé les pommes de terres, les choux, les harricots, etc.
Les anciennes terrasses cultivées sont encore visibles dans le paysage. Ici entre Cazaux-Debat et Ris, sous la chapelle dédiée à Notre Dame des Neiges
La culture en terrasse était trés difficile pour plusieurs raisons : la terre était pauvre et le sol granitique afleure vite. Le blé prés du mur de la terrasse était de taille normale, celui prés du mur de la terrasse supérieure ne pouvait se développer.
Chaque année, orages et neige entrainanent quelques murtes qui s'effondraient sur la terrasse inférieure, laquelle pouvait s'effondrer à son tour. Alors, il fallait trier les pierres, dégager l'arrière du mur écroulé pour reconstruire en pierre sèche. Aprés seulement on remontait la terre.
Enfin, les moissons se faisaient à dos d'hommes, en transportant de lourds fagots sur plusieurs kilomètres, jusqu'au village conçu pour être en contrebas. On remontait et l'on recommencait l'opération.
Le blé cueilli, il fallait le moudre. Le moulin se situait au hameau de la Prade, au bord de la Neste dont il utilisait la force motrice des flots. Il appartenait à la famille Fontan. Les Fontan n'étaient pas nobles, et la noblesse avait d'ailleurs peu de poids dans les vallées pyrénéennes. Il n'y avait pas de droits féodaux liés à l'usage du moulin, mais il y avait monopole. Le moulin appartenait aux Fontan, et les villageois devaient s'y rendre parce qu'il n'y en avait pas d'autre. D'ailleur, il était situé sur la rive droite de la Neste, comme le village, est le chemin qui y menait en surplonbant la Neste par endroit de plusieurs dizaines de mètres, était le chemin vicinal qui menait à Bordères.
Le moulin des Fontan, aujourd'hui détruit, se situait au lieu appelé les Bains de la Prade, car en face du moulin se trouvait un petit établissement de bains, de quelques baignoires, alimenté par une source d'eau sulfureuse
De l'autre côté de la passerelle, rive gauche, l'établissement de bains existe encore (il est visible depuis la route) mais la source s'est perdue
Pendant plusieurs siècles, il semble que le maire de Cazaux-Debat ait été un membre de la Fontan, et ce quelque soit le régime politique. Avec leur moulin, ils avaient sur leurs concitoyens un ascendant certain.
L'un d'entre eux c'est ému de cette situation. Il s'appelait Dominique Davezan.
Le 28 mai 1841, sous le Régne de Louis-Philippe, il écrivit au sous-préfet de Bagnères de Bigorre, arrondissement dont dépendait Cazaux-Debat.
De quoi se plaint-il ?
Il est l'un des huits propriétaires des prés qui sont traversés par le chemin qui mène au moulin et il se plaint des dommages que créent les passages sur le chemin. Ainsi, l'âne d'une certaine Jeanne Borde, de Ris, a brouté dans son champ en passant. Il a donc traduit cette dame en justice, et il a perdu. Mais c'est le maire, Fontan, qui est son ennemi dans l'affaire. Car il estime que le chemin n'airait pas dû être calssé en chemin vicinal, c'est à dire public. Il y a un autre chemin qui mène au moulin, en descendant au pont de Cazaux,alors en bois, puis en prenant ce que l'on appelait à l'époque "la route thermale" (de Bagnères de Bigorre à Bagnères de Luchon"), via le hameau de La Prade, en passant devant chez Fontan.
Que dit le maire ?
Le chemin pour se rendre au moulin et à Bordères est ancien, il ne traverse pas la Neste (quand la Neste était en crue, elle emportait fréquement le pont de Cazaux, alors en bois). Le classement en chemin public est conforme à la loi et à une délibiération municipale. Sur les huit propriétaires concernés, un seul fait une pétition, et il soupçonne ses opposants (il dit : "mes ennemis") d'être derrière Dominique Davezan.
En cette année 1841, la situation politique est donc tendue à Cazaux -Debat. La population du village n'a jamais été aussi nombreuse, 153 habitants. Au nombre, s'ajoute une grande inégalité de situation entre les principaux propriétaires, qui ont une dizaine d'hectares à exploiter ou à faire exploiter, les petits paysans et les brassiers, qui dépendent du bon vouloir des autres. Alors, Fontan est contesté, mais il maitrise encore la situation. Il repésente l'ordre des notables, à une époque où les maires sont nommés par les Préfets. Quand se ne sera plus la cas, les Fontan perdront le pouvoir.
A Cazaux-Debat, chaque maison avait son fournil. D'où l'importance du moulin.
Le petit appenti sous la cheminée de la maison Bégué cachait le four à pain.
La ferme des Davezan est aujourd'hui celle de Jean - Bernard Casteran.