Le mardi 8 octobre 2013, les desendants de Gabrièle Fisse et de Jeanne Monacelli ont reçu la médaille des justes. Voici reproduit l'article paru dans la
Dépêche :
http://www.ladepeche.fr/article/2013/10/11/1728894-le-devouement-de-jeanne-et-gabrielle-dans-l-histoire.html
"Deux institutrices de Cazaux-Debat, Jeanne Monacelli et Gabrielle Fisse, ont reçu, à titre posthume, la médaille des Justes parmi les nations. Durant l’occupation, elles avaient protégé
l’enfant juif Georg Hirsch, 8 ans, des nazis. «Leur courage immense a honoré l’histoire.»
Il y a des petites histoires, des gestes simples, qui résonnent davantage au révélateur de l’Histoire. Mardi après-midi, au musée de la Déportation et de la Résistance de Tarbes, deux destins
extraordinaires sont passés à la postérité : ceux de Jeanne Monacelli et Gabrielle Fisse, institutrices de campagne à Cazaux-Debat et aujourd’hui disparues, qui ont reçu la médaille des Justes
parmi les nations en présence de représentants du comité français pour Yad Vashem, du consul d’Israël, du préfet des Hautes-Pyrénées, du maire de Tarbes mais aussi de leurs descendants et de
survivants des camps d’extermination.
Il y a soixante-dix ans, elles ont protégé le jeune Georg Hirsch, arrivé dans les Pyrénées avec un groupe d’Autrichiens, suite à la guerre d’Espagne, où ils travaillaient comme bûcherons.
Nombre d’entre eux prirent part à la Résistance avec les réseaux des docteurs Marquié et Mounicq, en liaison avec les deux institutrices de Cazaux-Debat qui avaient recueilli le jeune Georg. «Il
faut saluer le travail de Paul Bouygard, qui a retrouvé l’histoire de ces Autrichiens débarqués à Cazaux, un village d’une trentaine d’habitants, souligne Nicole Caminade. En 1943, l’enfant a été
traqué. On a retrouvé des lettres insupportables de Français le dénonçant. Il a été caché par Jeanne et Gabrielle. Mais à partir d’une lettre qu’il a écrite à sa mère, détenue à Amiens, son
adresse a pu être retrouvée et la Gestapo finira par l’arrêter à Amiens, chez la famille Sulhof qui l’avait recueilli.» à l’âge de 9 ans, l’enfant sera assassiné à Auschwitz, comme sa mère
l’année précédente. «C’est la première fois que l’on accorde cette médaille à des personnes qui ont cherché à sauver un enfant finalement mort avec les autres dans les camps.» Une issue fatale
qui hantera ses deux protectrices, rongées par le remords de n’avoir pu sauver l’enfant. «Gabrielle ne nous en parlait pas beaucoup, avouent ses nièces Françoise et Marie-Lise, qui ont reçu la
médaille pour leur tante défunte. C’est à la fois une question de génération et aussi le signe d’une souffrance que l’enfant soit mort. Mais c’était dans son caractère. C’était une résistante et
une institutrice qui aimait donc les enfants. On ne pensait pas que quelqu’un ferait cette démarche pour elle. Aujourd’hui, elles sont reconnues dans ce qu’elles ont fait. Le seul regret, c’est
que ce ne soit pas de leur vivant…»
«Le plus beau visage de l'humanité»
Le consul d’Israël à Marseille, Barnéa Hassid, a également rendu hommage à ces deux femmes dévouées : «Leur courage immense a honoré l’Histoire. La révolte face à la barbarie n’était pas
chose évidente. Dans cette période la plus sombre de l’humanité, beaucoup ne s’y sont pas opposés et ont abandonné la dignité humaine. Les Justes, eux, ont agi pour que survivent ces âmes
innocentes, souvent seuls mais avec une conscience de fer. Les actes de Jeanne et de Gabrielle doivent rester des modèles d’éducation pour les générations à venir. C’est là le plus beau visage de
l’humanité. Nous leur sommes à jamais reconnaissants».
Ce sont le fils de Jeanne
et les nièces de Gabrielle qui ont reçu la médaille des Justes et le diplôme./Photo Laurent Dard
18 Justes en Bigorre
Le comité Yad Vashem répertorie dix-huit Justes dans les Hautes-Pyrénées, ayant protégé, caché ou sauvé des Juifs de la barbarie nazie : Marcel Billières, Marie Cheminade, Marie et Pierre
Desbiaux, Gabrielle Fisse, Anne-Marie Llobet, Jeanne-Eulalie et Joseph Marmouget, Charlotte et Eugène Sabathié, Charlotte et Charles Soubies, Marie Tarbes, Maurice Trélut, Georges et Jacques
Vigoureux."
Andy Barréjot
La médaille des Justes est un acte de remerciement créé par l'Etat d'Israel en 1953.
Georg Hirsch
Gabrielle Fisse (au milieu) de retour de captivité à Amiens, en 1943. Avec son amie Jeanne Fourasté, elle avait aidé les Autrichiens de Cazaux - Debat et en particulier, caché le petit Pierre
Spiegel, né en 1941 à Arreau
Les Autrichiens à Cazaux - Debat. Aupremier plan, dans la pousette, Pierre Spiegel
Jeanne (Andrée) Monacelli, née Fourasté
La cérémonie :
Les portraits de Jeanne Monacelli, Gabrielle Fisse, et les deux médailles
L'assistance

Les autorités : Au pupitre, le
maire de Tarbes, dont le prédecesseur Marcel Billière avait aidé les Autrichiens de Cazaux - Debat. Directeur de l'hôpital de Tarbes, il avait permi à Martha Guttman de recevoir des soins
et de mourrir dans la dignité.
A droite du maire actuel; Albert Seifer, représentant de Yad Vashem à Toulouse et aux côtés de ces derniers, Nicole Caminade, représentante de Yad Vashem à Paris, qui a instruit le dossier. A la
gauche du maire, Monsieur le Consul d'Israël à Marseille, et à la gauche de ce dernier, Monsieur le Préfet des Hautes Pyrénées.
A gauche, les familles en discution avec Madame Caminade, et à droite, le consul d'Israël se recueille devant les photos.
Jean Michel Monacelli reçoit la médaille des Justes et le diplôme au nom de sa mère
Les nièces de Mademoiselle Fisse reçoivent la médaille des Justes et le diplôme au nom de leur tante.
Les enfants de l'école lisent un poème.
Aprés les Hymnes d'Israël et de la France, la chanson de Jean Ferrat "Nuit et Brouillard", a été interprètée
Quelques photos supplémentaires de la cérémonie :
En conclusion, la lettre adressée par les Autrichiens de Cazaux - Debat, en remerciement de l'accueil qu'ils avaient reçus dans les Hautes Pyrénées :
« Vienne, le 8 novembre 1972
A monsieur Ferrou, ancien maire de Cazaux-Debat, Hautes Pyrénées, France
Le 30ème anniversaire de l’occupation du territoire restant de la France par l’armée hitlérienne nous donne l’occasion de nous souvenir des terribles années de la terreur militaire, politique
et de la répression spirituelle, exercées par les occupants allemands dans la France et ailleurs en Europe. En même temps, nous nous rappelons des innombrables victimes connues et inconnues, qui
ont perdu leur vie pendant les années 1940 à 1944 sous la terreur sanglante de l’occupation par l’armée fasciste allemande.
De même, nous nous rappelons des douleurs et des souffrances que les occupants barbares hitlériens ont fait endurer au peuple français et à d’autres peuples européens.
En même temps, nous n’oublions pas les magnifiques exemples de bravoure, d’esprit de résistance et de solidarité que nombreux de Français ont témoigné dans la lutte contre l’ennemi abominable
et cruel de toute L’humanité, Ies occupants allemands.
Avec des sentiments de reconnaissance extrême, il reste en notre mémoire la loyauté et Ie secours que les Français, et même l’administration française, ont démontré envers notre groupe de
résistants autrichiens en France, pendant les années 1940 à 1944.
Nous pensons surtout à vous, cher Monsieur FERROU, l’ancien maire de CAZAUX-DEBAT, au maire et médecin à ARREAU, au médecin de SARRANCOLIN, au maire et médecin de LANNEZAN, au médecin-chef de
l’hôpital psychiatrique près de LANNEI\EZAN, à Madame Ie docteur en médecine , en 1943, à CLERMOND-FERRAND, aux institutrices de BARRANQUEU, de CAZAUX-DEBAT et de CASTEINAU-MAGNOAC, aux nombreux
citoyens français de la région de la vallée d’AURE et à toutes les autorités du département des HAUTES-PYFENEES.
Aucun, sans exception, des personnes citées, n’était porté de nous livrer aux occupants allemands. Chacun d’eux nous a donné tout le secours dont nous avions besoin. De ce fait nous avions
les moyens de rester dans la vallée d’Aure tant qu’il nous fallait.
Veuillez accepter, ci-joint, la petite documentation sur la résistance autrichienne en France et le petit livret de notre capital VIENNE, comme signe de notre grande reconnaissance. »
Le courrier est signé de Gradl Joseph (Joseph Gramont), et des « anciens bûcherons de la vallée d’Aure, Hautes Pyrénées, France, des années 1940 à 1944 » :
AUER Karl, GREDLER Jan, JELLINEK Paul SCHWAGER Zalel, SPIEGEL Harry, GOGGINGER Franz, GUTMANN Martha, KUNSCHIK Ernst, SEIIR Richard, HIRSCH Albert, MEISEL Josef, SPIEGEL Irene
Le contrat de travail de l'un des Autrichiens, Josef Gradl, signé du maire de Cazaux - Debat, qui leur avait aussi fourni des papiers d'identité.
Le dossier de Jeanne Monacelli, à Yad Vashem :
Le dossier de Gabrielle Fisse, à Yad Vashem :