A la fin du XIXème siècle, la France a colonisé l’Indochine, partagée en cinq régions : le LAOS, le CAMBODGE (protectorats), le TONKIN, l’ANNAM et la COCHINCHINE. Ces trois dernières régions correspondent au VIETNAM actuel.
Les habitants de la métropole avaient tendance à appeler « annamites », les habitants de l’actuel VIETNAM, qu’ils soient du TONKIN, de l’ANNAM ou de la COCHINCHINE.
Durant le premier conflit mondial, 90 000 Indochinois sont amenés en France dont plus de la moitié en qualité de travailleurs.
Travailleurs coloniaux vietnamiens déchargeant des obus de 75 à l'arsenal de Tarbes 1916
photos : SPA (Section photographique de l'armée) Collection Bibliothèque de documentation internationale contemporaine http://www.bdic.fr/
Ces arrivées ne répondent pas à un plan préétabli mais à l'émergence régulière de besoins en main d'œuvre. Un premier groupe de 40 ouvriers spécialisés arrive au printemps 1915, à l'initiative du Directeur de l'Aéronautique. Ils sont suivis par des contingents de plus en plus nombreux d'ouvriers non spécialisés, surtout en 1916 et 1917.
Dépendant du Ministère de la Guerre, le Service des Travailleurs Coloniaux, créé en décembre 1915, va introduire en métropole un peu plus de 220 000 ouvriers en provenance des colonies dont 49 000 Annamites selon l'expression de l'époque.
Les travailleurs coloniaux vietnamiens à l'arsenal de Tarbes 1916 coll. BDIC", http://www.bdic.fr/
Ces travailleurs sont organisés en groupements qui correspondent au lieu et au type de travaux qu'ils effectuent. Ils seront tout d'abord affectés à des industries de guerre et des compagnies de chemins de fer puis à des travaux de creusement de tranchées et de "nettoyage" du champ de bataille.
Des peintres d'obus Arsenal de Tarbes 1916 coll. BDIC", http://www.bdic.fr/
Manutention de caisses de poudres Tarbes 1916 coll. BDIC", http://www.bdic.fr/
Pour la construction du canal entre AVAJAN et ARREAU, un contingent de travailleurs annamites a été employé par le ministère de la guerre. Un cantonnement avait été installé à CAZAUX-DEBAT en face du pont sur la Neste, à côté du hameau de la Prade. Le responsable de ce cantonnement de 130 personnes en avril / mai 1918 et 149 en août, était monsieur François Balagué, chargé du contrôle à la poudrerie nationale de TOULOUSE
Croquis de barraque de type Adrian, du nom de son inventeur. Ces cabanes étaient conçuent pour être des abris provisoires permettant le repos des troupes relevées du front. Elles étaient en bois, avec un revêtement impérméable. Elles étaient grandes : elles pouvaient accueillir soixante personnes
Les conditions de vie de ces travailleurs indochinois étaient difficiles. Ils se sont installés à Cazaux-Debat dans un prés qui présente le double inconvenient d'être humide et froid en hiver, chaud en été. L'hiver 1918 a été particulièrement froid avec un épisode de neige début avril, au moment de leur insatallation. L'été 1918 a été caniculaire.
Dans ce près appelé Les coureyes, était installé le camp des annamites, soit sans doute 3 cabanes de type Adrian
Des témoignages récents tendent à montrer que ces travailleurs étaient isolés. Des autres travailleurs, logés à Bordères -Louron et Avajan, qui bénéficiaient des bars chez l'habitant pour faire la fête. De la population aussi, mais pas totalement. Des rapports de police montrent qu'ils avaient des rapports avec des personnes venues d'Arreau. Des personnes du village étaient employées au camps comme cantinières. Toutefois, ils venaient de loin et ils faisaient peur aux jeunes filles qui venaient de Lançon travailler à la scierie de la Prade, à côté du camp.
D’après les registres d’Etat civil, ces « annamites étaient majoritairement originaires de différentes provinces du TONKIN, certains de l’ANNAM et d’autre de COCHINCHINE.
Musicien vietnamien devant une cabane Adrian - Photo prise à Angoulème - Il s'agit d'un encadrant (il porte un grade)
Dans quelles conditions ont-ils quittés Toulouse ?
Durant l'été 1917, des émeutes éclatent à Toulouse, à l'usine de Saint Médard. Cette usine de la Poudrerie de Toulouse employait une main d'oeuvre de 5000 annamites sur un total de 16000 ouvriers er ouvrières. Il s'agit d'émeutes à carractère racial, trés violentes. Les ouvriers coloniaux (ici, les annamites, mais d'ordinaire, les violences visaient majoritairement les Nord-africains) étaient visés car considérés comme planqués à l'arrière, comme refusant de sd'associer aux grèves (leur statut leur interdisait, et il y avait aussi le manque de culture syndical de la quasi totalité d'entre eux, et la barrière de la langue), et enfin, la proximité avec les femmes qui remplaçaient dans les usines les hommes mobilisés. De plus, les travailleurs coloniaux étaient encore moins bien payés que les femmes, en particulier sur les horaires du dimanche et les nuits. C'est donc eux qui faisaient l'essentiel du travail sur les horaires "décallés". Ils effecuaient les travaux les plus pénibles, dangereux, et au contact des produits les plus toxiques : peindre les obus, les remplir... Beaucoup avaient donc des troubles pulmonaires liés à l'exposition à ces toxiques : peut-être est-ce sur ces critères qu'ils ont été envoyé à la campagne, à Cazaux-Debat. Pour réduire la pression sociale et pour essayer d'améliorer leur état de santé.